mercredi 24 avril 2019

VERONIQUE SANSON au Dôme de Paris – 24 AVRIL 2019


Voilà plus de trente années que je n'étais pas retourné voir Véronique SANSON. C'était à l'Olympia le 28 février 1989 lors de sa tournée "Moi, le venin". Pas plus à cette époque que maintenant je ne fus un admirateur inconditionnel de la dame ; c'est indéniablement une bonne chanteuse et elle a surtout le mérite de composer tous ces titres et d'écrire seule de magnifiques textes, mais d'autres artistes sont plus ou moins dans ce cas sans pour autant valoir mon déplacement. En fait, à l'époque c'était dans une démarche militante que je m'étais décidé à assister à son concert.
Il faut se rappeler que sa chanson intitulée "Allah" avait offensé des oreilles paranoïaques et intolérantes. En dépit d'explications de texte, ce titre avait été censuré dans de nombreux médias et l'album fut même retiré de certains points de vente ! Cette atteinte à sa liberté d'expression fut de surcroît tolérée par quelques élites, ce qui me décida à la soutenir, espérant bien qu'elle maintiendrait son répertoire en concert. Hélas, j'avais été bien déçu par le retrait dudit titre.
Cependant, à l'occasion de ce concert, je m'étais aperçu que la dame savait bien s'entourer pour proposer un spectacle qui m'a semblé davantage rythmé par du rock que par une variété populaire dont on aurait pu a priori la soupçonner. Section de cuivres, choristes, guitaristes et percussionnistes de tous poils soutenaient la belle quadragénaire rentrée des Etats-Unis depuis quelques années. 

Voilà pour mes antécédents. Cette fois, ma p'tite Fée n'ayant pas encore eu l'occasion de voir cette artiste, j'ai saisi une opportunité d'acquérir des entrées à prix abordable. Or, sans l'avoir particulièrement ciblé, il se trouve que ce 24 avril constitue son soixante-dixième anniversaire. Ce sera une raison supplémentaire de s'émouvoir, d'autant plus que des soucis de santé ont bien failli interrompre définitivement sa carrière. Ce printemps lui permet de reprendre la tournée promotionnelle de son quinzième album "Dignes, Dingues, Donc" paru en 2016.
La soirée était annoncée "complet", toutefois nous n'avions pas de voisins à nos sièges qui, il est vrai, n'étaient pas très enviables. Puisque nous n'avions pas tenu à payer trop chère notre entrée, fatalement nous n'avons pas bénéficié du meilleur emplacement ! Excentrés en surplomb sur la gauche de la scène, on ne voyait pas le fond et donc les musiciens qui s'y trouvaient (le batteur, les deux choristes, et le quatuor de cordes). Néanmoins, le piano de la Dame était orienté en notre faveur, ce qui fut agréable, même si on était loin. Hormis notre position, la salle était bel et bien pleine comme un œuf, d'un auditoire conquis d'avance. La moyenne d'âge est relativement élevée, je dois représenter ce chiffre, très probablement …

L'éclairage fut correcte (rien d'extraordinaire) et la sonorisation fut très bonne, même si l'acoustique de la salle à cet endroit laissait percevoir un peu de réverbération. Mais les pupitres étaient parfaitement équilibrés autour de la voix principale. Cet équilibre sonore s'imposait car sur scène pouvaient participer une bonne douzaine de musiciens ; outre les sept précités, il y avait une section de cuivres (trombone, saxophone et trompette), un claviériste, un bassiste et un guitariste.

Voilà pour le cadre. Après, c'est affaire de gout et de perceptions. On accroche ou pas, mais on ne peut pas rester indifférents aux rythmes assez variés. Véronique Sanson n'est pas particulièrement à l'aise pour parler à son public, elle l'avoue elle-même ; elle chante mieux qu'elle ne parle. Cela tombe bien, c'est ce que nous sommes venus écouter. Ses ennuis de santé n'ont fort heureusement pas altéré son timbre de voix, toutefois sa tessiture est désormais limitée ; je l'ai particulièrement remarqué sur des titres comme "Vancouver". Cela n'a cependant rien de rédhibitoire car elle parvient à adapter son chant à l'octave requis, voire laisser astucieusement chanter le public à sa place. La comparaison avec son concert d'il y a trente ans nécessite donc une légère indulgence qui me permet d'apprécier le talent de cette remarquable artiste.

Son fils, Chris Stills, a assuré la première partie de soirée au sein d'un trio. Du bon rock américain, efficace sans être renversant. Mais j'imagine l'émotion qui devait l'étreindre. D'autant plus lorsqu'il est revenu lors du rappel de sa maman pour interpréter avec elles "On m'attend là-bas" !
Habituellement, dans mes récits je tente toujours d'énumérer les musiciens ; mais si Véronique prend bien soin de les présenter et les remercier, en revanche je serai bien incapable de trouver un site pour trouver leurs noms. J'ai surtout remarqué le bassiste (un très fidèle collaborateur semble-t-il), mais aussi le trombone et le saxo. Ils ont eu la possibilité de s'exprimer assez librement surtout lors d'une impro bien jazzy aux cuivres. Autres interventions notables, (mais pas indispensable) celles de Christophe Maé et Vianney, chanteurs apparemment appréciés de Madame et d'une partie de son public (…). A mon humble avis, le mec au djembé aurait pu également s'abstenir, tout comme les deux individus (danseurs ?) venus s'agiter inutilement… M'enfin disons que la soirée s'est passée sans trop de fausses notes.

J'ignore si ce jour anniversaire aura justifié la longueur du concert, mais le fait est que de 21h40 jusqu'à minuit dix (et des poussières) nous eûmes droit à une large évocation de son répertoire avec vingt-trois chansons tirées de treize de ses quinze albums.
PROGRAMME :
Dignes, dingues, donc... (Dignes, Dingues, Donc..., 2016)
Radio Vipère (Moi, le venin, 1988)
Monsieur Dupont (Laisse-la vivre, 1981)
Marie (Moi, le venin, 1988)
Ces moments-là (Dignes, Dingues, Donc..., 2016)
Vols d'horizons (Plusieurs lunes, 2010)
Ainsi s'en va la vie (Véronique Sanson, l'Album blanc, 1985)
Je me suis tellement manquée (Indestructible, 1998)
Et je l'appelle encore (Dignes, Dingues, Donc..., 2016)
L'écume de ma mémoire (Dignes, Dingues, Donc..., 2016)
La loi des poules (Dignes, Dingues, Donc..., 2016)
Chanson sur ma drôle de vie (avec Vianney) (De l'autre côté de mon rêve, 1972)
Vancouver (Vancouver, 1976)
Amoureuse (Amoureuse, 1972)
Besoin de personne (avec Christophe Maé) (Amoureuse, 1972)
Rien que de l'eau (Sans regrets, 1992)
Et s'il était une fois (Dignes, Dingues, Donc..., 2016).
RAPPEL :
Bernard's Song (Il n'est de nulle part) (Hollywood, 1977)
On m'attend là-bas (avec Chris Stills) (Le Maudit, 1974)
Toute une vie sans te voir (7ème, 1979)
Ma révérence (7ème, 1979)
Visiteur et voyageur (Sans regrets, 1992)
Bahia (Amoureuse, 1972).

Très émouvant final durant lequel Véronique se confia avec quelques chansons intimes, seule avec son piano. On croit deviner l'artiste, mais aussi la femme, qui au fil de sa carrière et de sa vie, aura consommé sa vie pleinement mais ainsi accumulé sources de scrupules et de mélancolie. J'ai senti l'émotion étreindre sa gorge plus d'une fois et des frissons parcourir mon dos. Voici, pour mémoire quelques extraits de ses paroles finales qui en disent longs :

"Toute ma vie sans te voir
C'est ça qui me fait mal
C'est ça qui me fait vieillir
Et j'ai perdu mon âme
Quand j'ai perdu ton sourire"

"Oh, j’ai beaucoup voyagé
Je suis partie sans le vouloir
Mais j’ai comme des pierres dans ma mémoire
Je suis comme un pion qu’on peut pas jouer
Tout seul"

"Quand j'n'aurai plus le temps
De trouver tout l'temps du courage
Quand j'aurai mis vingt ans
A voir que tout était mirage
Alors j'entends au fond de moi
Une petite voix qui sourd et gronde
Que je suis seule au monde."

Bon, globalement ce fut une bonne soirée. Notre passion pour la richesse musicale qu'exprime le rock progressif explique probablement une certaine exigence qui nous gêne pour nous extasier comme le reste de l'auditoire de ce soir. Cependant je ne regrette pas le déplacement et je rends hommage à cette artiste qui sait raconter sa vie avec pudeur et poésie. Son talent me semble bien au-dessus du lot de ce que les médias français veulent bien nous délivrer …

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