Lorsqu'un de mes
groupes favoris annonce son concert au Stade de France, j'hésite toujours à
engager ma participation. Comment ignorer l'événement, au prétexte de la
démesure du lieu, sans risquer la frustration des émotions que peuvent procurer
ces grand-messes qui s'y déroulent en présence de plus de quatre-vingt mille adeptes
? Sempiternel dilemme.
Car je n'ai pas
de réel préjugé définitif sur la question. Si je conserve une petite préférence
pour les auditoriums de taille modeste, en revanche j'apprécie aussi les vastes
sites qui ont au moins l'avantage de me rassurer sur l'état de notre microcosme
de valeureux mélomanes français ! J'aime ressentir cette vaste communion d'un
public atypique, uni dans une même transe !
Indépendamment
de l'aspect strictement festif (quelques
pompes à bières et quelques latrines suffisent à mon bonheur), ce qui m'inquiète
le plus, en tant que mélomane (relativement) exigeant, c'est la qualité
acoustique du site accueillant le concert. En réalité, même si un stade (ou un site extérieur de festival) ne
vaudra jamais un véritable auditorium, le confort acoustique dépend du
placement mais aussi de la perspicacité de l'ingénieur du son. Et finalement, cette
exigence de placement et d'expertise de la console me parait également applicable
pour les salles.
Dans les gradins
de ce stade, j'ai parfois été frustré, mais pas systématiquement. Pour assister
au concert des Mets en 2012, j'avais bénéficié d'une très bonne acoustique en
étant assis en gradin, face à la scène (donc tout au fond de l'incurvation). En
revanche, pour d'autres concerts, sur les côtés j'ai souvent subi soit des
réverbérations excessives, soit l'excès de basse/batterie, avec de surcroit un
décalage entre le son et l'image sensée être diffusée en direct sur les écrans.
(Argh !)
Selon le même
principe, en fosse il vaut mieux être dans le secteur prolongeant la console
centrale, soit devant elle soit derrière, mais dans son axe.
Ce soir, j'ai
mené ma p'tite Fée et mon fils en pelouse "carré-or", placés entre la
console et la scène, pour savourer un son puissant mais parfaitement audible !
A condition de mesurer au moins 1,80 mètres, cet emplacement s'est bel et
bien avéré idéal et ce, pour les trois concerts.
En contrepartie,
il a fallu me montrer vif et vigoureux pour nous maintenir dans la horde
chahuteuse, qui s'est manifestée surtout au début du concert des Mets… Je me
demande pendant combien d'années je vais pouvoir tenir dans ce genre de fosse …
Lors des premières séquences du concert des Mets, j'ai laissé mon fils
surexcité filer vers l'avant, pendant que je tentais de protéger ma p'tite Fée
dans un joyeux chaos ! Toutefois, passé l'orage introductif, nous avons pu
rester bien placés (pour ma taille) jusqu'au
rappel. Afin de permettre à ma p'tite Fée de voir un peu la scène, nous nous
sommes retirés sur le côté droit, pour bénéficier d'un point de vue davantage acceptable
pour elle, mais d'une acoustique détériorée : trop de basse/batterie. Mais pas
de quoi gâcher mon plaisir cependant ; il suffisait de revêtir les protections
auditives !
Tous ces efforts
sont assumés, car METALLICA et moi, c'est une longue histoire. Il m'est juste
impossible de manquer leur unique passage de l'année en France. Les deux motifs
principaux sont purement subjectifs :
- Je
suis natif de mars 1963, ils sont donc de ma génération : Lars Ulrich (batterie, percussion,
depuis 1981) est né en décembre 1963, James Hetfield (chant, guitare rythmique depuis 1981), est né en
aout 1963, Kirk Hammett
(guitare, depuis 1983) est né en novembre 1962 et Robert Trujillo (basse, chœur, depuis
2003) est né en octobre 1964.
- Leur
opus "Kill'em All !"
est paru le 25 juillet 1983 … Leur musique pulvérisait les styles connus ;
les headbangers (en gros, les admirateurs
de Motörhead) ont immédiatement accroché à ce nouveau concept dont on
pressentait déjà l'avènement avec des groupes comme Anvil. Je fis donc
partie de ceux qui ont mis les doigts dans la prise, mais timidement à
l'époque. Il y a trente-cinq années, c'était le 9 février 1984 à l'Espace
Balard (Paris 15ème), aujourd'hui disparu, METALLICA assurait
la promotion de "Kill'em All",
en invité de Venom. Certains commentateurs leur attribuaient une étiquette
"trash", terme que je n'ai jamais trop validé en ce qui me
concerne ; pour moi c'est avant tout du heavy metal et d'ailleurs la suite
de leur carrière me donnera raison. Ce soir-là, en dépit d'une acoustique douloureuse,
la décharge électrique fut fatale ; je ne m'en suis jamais réellement
remis. Les neurones cramés, nous étions sortis de ce concert avec la
quasi-certitude que ces mecs iraient loin. En tous cas plus loin que Venom
car les Mets leur avait volé la vedette, en ce qui me concerne au moins ! De
tournées en festivals, leurs prestations parfois hors de France
(Angleterre, Belgique) ont entretenu ma passion. C'est ainsi, toujours
insatiable, que je me rends pour la 18ème fois à leur concert. SEMPER
FIDELIS !
En outre, ce
sera l'occasion pour mon fils de découvrir ce groupe légendaire ! J'ai découvert
les Mets alors que j'étais à peine plus âgé que lui. Et puis, cette date du 12mai est symbolique pour mon couple ; nous avions assisté au même concert il y a
sept années sans nous rencontrer (…). Et enfin, retrouver des potes autour
d'une mousse, ça fait toujours plaisir !
Voilà pour le
contexte. De l'émotion, de la passion, de la convivialité … quoi demander
d'autre !
J'ajoute que
nous avons une chance inouïe avec la météo ; hier encore il pleuvait des
hallebardes, alors qu'aujourd'hui c'est légèrement nuageux mais le soleil
prédomine avec un petit vent frais. Juste excellent pour moi ; je n'apprécie
que très modérément les grosses chaleurs !
La file
d'attente se résorbe relativement rapidement. Nous ne tardons pas à nous
faufiler afin de garantir une place la moins pénalisante possible ; je me
rappelle avec envie de la poudre magique utilisée pour réduire les têtes, dans
Beetljuice. Mais là je m'égare, j'en conviens…
BOKASSA (18h15-18h40)
Trio norvégien fondé en 1994,
mais dont j'ignorais l'existence, il est composé de Olav Dowkes (à la batterie), Jorn Kaarstad
(au micro et la guitare) et Bard Linga
(à la basse). Leur prestation promeut "Crimson
Riders" paru récemment et propose un stoner plutôt efficace. Intéressante
première partie, bien que je soupçonne une plus grande force de conviction dans
un club ou en tous cas une petite salle. Je doute de conserver un souvenir
impérissable de leur prestation mais je leur souhaite volontiers un succès que
semble leur promettre une part du public bienveillant …
Programme : (à déterminer)
GHOST (19h15-20hxx).
Je me souviens
qu'à l'origine je ne voulais pas entendre parler de ce groupe suédois qui sévit
sournoisement depuis 2008. Son image, son univers ne m'intéressait pas, jusqu'à
cette nuit fatidique du 10 juin 2016 où, par le bienfait (?) d'un festival, je
fus heureusement tenté de rester pour les écouter. Pauvre de moi, pauvre de
nous, le maléfice fatal a opéré sur mon frêle esprit ; j'ai succombé aux
charmes envoutants de ces rythmes et de ces mélodies redoutablement efficaces.
Je dois bien le confesser ; adepte asservi, voilà maintenant six fois que
j'assiste à une messe de Ghost.
Une sonorisation
impeccable et implacable a contribué à secouer les nuques, chauffant ainsi les
muscles avant une soirée qui s'annonçait agitée. L'éclairage fut marginal, la
nuit n'était pas encore tombée. Le décor était minimaliste mais astucieusement
construit ; une sorte de portail en vitrail en guise de fond de scène. La
largeur de la scène est très vaste et permet aux musiciens de bouger beaucoup.
Ce soir, sur un
programme de douze titres, cinq sont tirés de leur quatrième opus, "Prequelle" qui est paru le 1er
juin 2018. Etonnamment, ces chansons que je trouvais un peu trop pop passent
très bien sur scène. En particulier "Miasma"
titre instrumental au cours duquel la séquence au saxo laisse rêveur quant à un
éventuel usage accru à l'avenir …
Pour le reste, c'est
une succession de titres incontournables qui régalent le public dont une partie
semble découvrir ces mécréants.
Programme :
Ashes (Prequelle, 2018)
Rats (Prequelle, 2018)
Absolution (Meliora,
2015)
Ritual (Opus
Eponymous, 2010)
From the Pinnacle to the Pit (Meliora, 2018)
Faith (Prequelle, 2018)
Cirice (Meliora, 2015)
Miasma (Prequelle, 2018)
Year Zero (Infestissumam,
2013)
Mummy Dust (Meliora,
2015)
Dance Macabre (Prequelle, 2018)
Square Hammer (Popestar, 2016).
Objectivement, les
rythmes me paraissent assez binaires, les soli plutôt courts, le chant d'une
tessiture limitée et le timbre banal … Alors, par quel sortilège cette musique m'attire
à ce point ? Il n'y a pas d'explication rationnelle ; le monsieur a juste un
don de communication, un sens de la mélodie que beaucoup d'autres suédois
cultivent (ABBA, A.C.T., Opeth, Pain of Salvation, Therion, Tiamat, …).
Honnêtement, je
craignais que cette prestation se passe mal face à un public impatient et
exigent, mais fort heureusement, GHOST a recueilli une ovation méritée.
METALLICA
(21h-23h15).
L'extrait
audio-vidéo du film culte de Sergio Leone produit toujours le même effet dans
le public dont le chant fait vibrer les cœurs à l'unisson ! La surexcitation
est (presque) à son comble, entre le recueillement pour un hymne et
l'impatience d'en découdre…Normalement, le déchainement devrait intervenir à ce
moment-là mais depuis peu les Mets ont pris l'habitude placer une autre
bande-son reprenant le thème du premier titre… Personnellement, je trouve cela fâcheux,
brisant une certaine spontanéité. Mais il s'agit heureusement d'un bref passage
à vide et lorsque les musiciens prennent leur place respective et font exploser
les décibels, c'est le chaos total dans la fosse ! Les diables sont dans le
bénitier et les anges (comme moi bien sûr) font ce qu'ils peuvent pour rester
connectés !
Très vite l'excellence
de la qualité du son rassure l'auditoire ; pas besoin de protection auditive,
c'est audible et puissant sans excès. L'éclairage est particulièrement
lumineux. Sur le plan visuel, l'écran central est impressionnant par sa taille
et la qualité de son image, en revanche les deux écrans latéraux me paraissent
diffuser une image de moindre qualité. Mais, cela m'est égal de mon point de
vue, car je me contente de l'écran central et de ce qui se passe en dessous.
Toutefois, la
scène est extraordinairement large, et dessine une mini-arène au centre de
laquelle quelques privilégiés béats se tiennent ainsi aux premières loges. Cette
configuration permet aux musiciens de satisfaire la curiosité d'un plus grand
nombre d'admirateurs !
Cette tournée
prétend promouvoir le double album "Hardwired…
to Self-Destruct" paru le 18 novembre 2016, mais seuls quatre
titres en sont tirés, contre cinq par exemple pour le black album ... Je trouve
cela dommage car ce double opus regorge de bien d'autres pépites à exploiter. Des
titres d'anthologie en empêchent d'autres mais il en va ainsi pour la plupart des
concerts de grands groupes ! Mais bon je ne vais pas faire la fine bouche car
durant plus de deux heures et quart, les Mets vont nous faire voyager sur plus
de trois décennies.
Le choix des
titres m'a paru intelligent, alternant le vif et le plus calme, permettant aux
musiciens ainsi qu'au public de souffler un peu …enfin, toutes proportions
gardées, hein !
Fait notable
dans la programmation, dans chaque ville/pays visitée, ils ont prévu de rendre
hommage à un artiste local. Robert Trujillo chante, accompagné de Kirk. A
Barcelone ce fut "El muerto vivo"
de Peret (c'ki ?). En France, c'est
"Ma gueule" de Johnny. Après
un instant de stupéfaction, c'est un impressionnant chœur qui s'est fait
entendre dans le stade ! Ce petit clin d'œil me semble très sympa, et
d'ailleurs la réaction du public atteste d'une approbation générale.
Notons
l'interprétation convaincante de "Frantic" issu d'un
album décevant (St Anger) que je
verrai bien remixé, mais cela n'engage que moi …
En tant que
sélectionneur virtuel, j'ai particulièrement apprécié "For Whom the Bell Tolls" dont mon
grand intérêt semble unanimement partagé, mais j'aurais volontiers entendu des
titres comme "Wiplash" ou
"Metal Milicia", au lieu
d'un "Seek & Destroy" peut-être un
peu trop rabâché. Bah on peut toujours espérer pour une prochaine fois.
PROGRAMME :
Intro audio/video "The
Ecstasy of Gold" (Ennio Morricone), puis bande-son intro sur le thème de Hardwired
Hardwired (Hardwired… to Self Destruct, 2016)
The Memory
Remains (Reload, 1996)
Ride the
Lightning (Ride the Lightning, 1984)
The God
that Failed (black album, 1991)
The
Unforgiven (black album, 1991)
Here Comes
Revenge (Hardwired… to Self Destruct,
2016)
Moth Into
Flame (Hardwired… to Self Destruct, 2016)
Sad but
True (black album, 1991)
Welcome
Home (Sanitarium) (Master of Puppets,
1986)
Ma gueule de Johnny (Rob
au chant et basse, accompagné de Kirk à la guitare)
Frantic (St. Anger, 2003)
One (…and Justice for All, 1988)
Master of
Puppets (Master of Puppets, 1986)
For Whom
the Bell Tolls (Ride the Lightning, 1984)
Creeping
Death (Ride the Lightning, 1984)
Seek &
Destroy (Kill’em All, 1983).
Rappel
Spit Out
the Bone (Hardwired… to Self Destruct,
2016)
Nothing
Else Matters (black album, 1991)
Enter Sandman (black
album, 1991).
Les quatre
cavaliers se sont montrés convaincants et maitrisant parfaitement
l'interprétation de leur répertoire pour le plus grand bonheur des puristes ! Enormissime
!!
Le retour pour
le rappel fut une apothéose avec les accords rageurs de "Spit Out the Bone", un des titres que j'attendais
beaucoup ! Puis, suivent deux titres qui les ont rendus populaires pour clore
le spectacle qui se conclue sur un p'tit feu d'artifices.
Les Mets
cherchent manifestement à entretenir une belle relation avec leur public ;
chacun des membres prend soin de venir nous remercier au micro avec quelques
mots sympathiques. Lars, toujours aussi mal inspiré, lance des propos qui me
semblent décalés. Ce soir ne fait pas exception, il semble s'adresser à un
public qui découvre Metallica ; j'aimerais pouvoir lui signaler que je suis
encore là après toutes ces années, de surcroît avec mon fils dont
l'enthousiasme semble garantir la relève.
Enfin, un
diaporama de photos et films pris dans la journée, montre l'engouement de leurs
admirateurs dans le stade et ses environs. Le tout finalement surchargé d'un
énorme THANK YOU. Cette reconnaissance est de nature à rassurer un peu, quand
même, à l'aune de leur choix managérial qui me semble les couper un peu trop de
leur public, à mon gout. Prix de tickets échelonnés pour les approcher, loges
VIP, marchandises tous azimuts. D'autres le font, je sais, même en pire. Mais
c'est laid. En même temps, ils ont bien raison d'assurer leur retraite, hein…
VIVE METALLICA !
Une chronique qui donne envie, merci Patrice
RépondreSupprimerTon intérêt me fait plaisir, merci.
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