Sans
doute à l'instar des autres mélomanes de ma génération, l'évocation de
SUPERTRAMP me renvoie à la mémoire de douces sensations adolescentes, à la fois
lumineuses et tourmentées. Je me revois à la campagne ou dans ma chambre,
allongé sur mon lit, rêvassant à tout et à rien, emporté par ces mélodies
entêtantes, inoubliables. A cette époque, je n'imaginais pas l'importance
artistique de ces œuvres qui passaient à la radio entre un titre des Bee Gees
et un autre d'Olivia Newton John. Le temps est passé, les paillettes sont
tombées et seules les étoiles continuent de briller. SUPERTRAMP est l'une
d'entre elles. Comme beaucoup d'autres étoiles, elle est hélas morte, mais
continue à briller et à faire rêver les éternels adulescents dont je fais
partie. Cette illusion est vaillamment entretenue par Roger Hodgson, l'âme
historique du groupe défunt qu'il a quitté en 1983.
Il
est permis, en tous cas je me permets, de déplorer ce départ qui fut justifié par
le tourbillon d'un succès difficile à gérer à l'époque. A l'instar des
admirateurs des Beatles, de Pink Floyd, d'ABBA et de bien d'autres groupes
prometteurs, nous avons été condamnés aux regrets éternels et à une frustration
jamais consolée. Dans nos rêves, nous espérions un Phœnix, alors qu'en réalité
Supertramp était composé d'hommes ordinaires avec leurs forces mais aussi leurs
faiblesses.
Mais
ce soir, il s'agit davantage que d'une illusion, car le Roger revient à Paris
qui l'accueille pour cinq dates (31 mai, 1er, 2, 3 et 4 juin) à
l'Olympia, à guichets fermés. C'est donc en privilégiés que nous prenons places
au troisième rang, juste en face du Monsieur pour assister à ce qui restera à
n'en point douter un des moments forts de l'année. Car en effet, inutile de
tourner autour du sujet, le Roger nous a ravi à tous points de vue.
D'abord
parce qu'il a eu la judicieuse idée de s'accompagner de musiciens très talentueux
afin de se rapprocher au mieux de l'univers de SUPERTRAMP : les californiens David
J Carpenter (basse, chœurs), et Bryan
Head (batterie), l'américain Michael
Ghegan (saxophone, clarinette,
flûtes, Harmonica, claviers, chœurs et percussions), et le canadien Ray Coburn (ex-Honeymoon Suite) (claviers, chœurs). Alors que Roger vient de
fêter ses 69 ans ce 21 mars, son talent sa vigueur et son sens artistique me
paraissent heureusement intacts. Sa voix continue à nous ravir les esprits, le
poids des ans me semble n'altérer que très peu son timbre. Si peu que personnellement
je n'ai rien perçu de fâcheux ; je n'évoque cette légère réserve qu'en écho à
une conversation post-concert.
L'éclairage
est lumineux, le son excellemment réglé, la scène relativement sobre est décorée
de palmiers. Les musiciens ont leur espace respectif dont aucun ne sortira. Seul
Roger alterne entre son piano et le micro placé au centre de la scène. Ray
Coburn semble "remisé", au fond à gauche de la scène ; Roger le surveille
dans ses rétroviseurs astucieusement vissés sur son propre clavier ! Cependant
le soutien le plus remarqué est indéniablement Michael Ghegan, un artiste
complet aussi à l'aise avec un saxo qu'avec le reste de ses nombreux
instruments. Un pur régal à chacune de ses interventions.
Autre
motif de réjouissance, la communication de Roger. Juste après le titre
d'introduction, il s'adresse au public pour l'inviter à laisser les soucis du
quotidien à l'extérieur et de se laisser bercer afin de ressortir de son
concert avec le sourire. Il n'hésitera pas à réitérer ce souhait, signe de la
bienveillance et de la sensibilité de cet honorable artiste.
Bref,
le climat est parfait pour passer une soirée mémorable. Ce compositeur
exceptionnel dispose d'un répertoire suffisamment étendu et méritoire pour
satisfaire sans lasser. Toutefois, l'absence de certains titres serait une
source de frustration ; l'artiste l'a bien compris.
PROGRAMME
:
Nous aurons eu
droit à 20 titres (au RAH en 2013 ce fut
22), choisis judicieusement dans son répertoire le plus populaire, sans
pour autant favoriser "Breakfast in
America" dont il était pourtant supposé commémorer le quarantième
anniversaire ; nous nous contenterons donc de 5 titres. "Supertramp/Crisis? What Crisis?" (1975)
aura été évoqué avec 3 titres, "Crime
of the Century" (1974) : avec 3 titres, "Even in the Quietest Moments" (1977) avec 3 titres et "Famous Last Words", (1982) avec 2
titres. Par ailleurs, quatre titres de ses opus solo auront été disséminés ici
est là, dont j'aurai particulièrement remarqué "Death and a Zoo".
Acte 1
Take the Long Way Home
(Supertramp/Breakfast in America, 1979)
School (Supertramp/Crime
of the Century, 1974)
Breakfast in America (Supertramp/Breakfast in America, 1979)
Easy Does It (Supertramp/Crisis? What Crisis? 1975)
Sister Moonshine (Supertramp/Crisis? What Crisis? 1975)
Lovers in the Wind (In the Eye of the Storm, 1984)
A Soapbox Opera (Supertramp/Crisis? What Crisis? 1975)
Along Came Mary (Open the Door, 2000)
Lord Is It Mine (Supertramp/Breakfast in America, 1979)
The Logical Song (Supertramp/Breakfast in America, 1979)
Acte 2
Child of Vision (Supertramp/Breakfast
in America, 1979)
Death and a Zoo (Open the Door, 2000)
If everyone was listening (Supertramp/Crime of the Century, 1974)
Even in the Quietest Moments (Supertramp/ Even in the Quietest Moments,
1977)
Had a Dream (In the Eye of the Storm, 1984)
Don't Leave Me Now (Supertramp/ Famous Last Words, 1982)
Dreamer (Supertramp/Crime
of the Century, 1974)
Fool's Overture (Supertramp/ Even in the Quietest Moments, 1977).
RAPPEL
Give a Little Bit (Supertramp/ Even in the Quietest Moments, 1977)
It's Raining Again (Supertramp/ Famous Last Words, 1982).
C'est
sur cette chanson optimiste que l'artiste et ses complices nous quittent ; "Il n'y a que le temps qui guérit la peine,
Et fait que le soleil se relève de nouveau" …Moui, c'est une forme
d'obstination positive à laquelle on peut faire mine de croire, au moins tant
qu'on est ici et ensemble…
Les
discussions entre auditeurs ravis vont bon train. Les minutes s'égrainent tant
et si bien que nous restons une quinzaine, à attendre Roger à la sortie des
artistes, tard dans la nuit, au risque de manquer le dernier métro. Les autres
musiciens sortent les uns après les autres ; David J Carpenter est
particulièrement disponible. Roger finit par sortir à son tour, visiblement
fatigué et pressé de partir, mais souriant. Avec un flegme tout britannique il
refuse les autographes, mais consent à poser pour quelques portraits en
compagnie de ses admirateurs les plus tenaces ... dont moi et ma p'tite Fée,
très émus. Au bout de quelques minutes, nous le laissons s'éloigner dans la
nuit parisienne, même si on a envie de lui chanter "Don't leave me now, All alone in this crazy world, When I'm old and
cold and grey and time is gone" (Ne
me laisse pas maintenant, Tout seul dans ce monde fou, Quand je suis vieux,
froid et gris et que le temps s'est enfui).
Superbe, bravo Patrice !
RépondreSupprimerMerci pour ton intérêt !
Supprimer♥♥♥
RépondreSupprimerUltra fan HardCore du groupe jusqu'au départ de Roger.....
Je n'oublierai jamais ses prestations à l'Olympia, je chialais comme un gosse d'entendre enfin les morceaux adorés si merveilleusement interprétés par Roger et son groupe... Ce type est une légende et tellement humble, humain et disponible.. Merci Patrice de ce compte rendu si brillant (comme dab... !)
Merci Marco ; je vois que l'émotion est partagée, ce qui est la vocation première de toute musique digne de ce nom.
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