Avant leur prestation au Raismesfest ce dimanche 14
septembre 2008, je n'avais jamais entendu parler de ce groupe belge. Ce
jour-là, j'avais été touché davantage par les autres groupes, davantage portés
sur le metal il est vrai ; il me semble que Machiavel cherchait une nouvelle voie à cette époque. Ce n'était
plus le groupe de rock progressif des années 70 et ce n'était pas encore le
groupe de pop assumé des années 2000.
Néanmoins, ces dernières années j'avais trouvé
beaucoup d'intérêt à écouter et découvrir ces deux époques. Formé en 1974, son
inspiration issue très clairement de groupes tels que Supertramp et Genesis, ne
lui a pas permis de se forger une réelle identité en dehors de la Belgique et
c'est sans doute ce qui a poussé les compositeurs à se tourner petit à petit
vers d'autres registres plus pop.
Même si on peut déplorer ce manque de persévérance
dans le monde du progressif, car il y avait un vrai potentiel me semble-t-il,
il n'en demeure pas moins que les derniers opus Eleven (2011), et surtout Colours
(2013) sont très soignés et dignes d'intérêt. Et du coup, l'annonce de leur
concert consacré aux années 70 m'a engagé à acquérir le ticket pour l'Ancienne
Belgique, salle que je ne connaissais pas encore.
L'Ancienne Belgique est un très bel auditorium qui
peut accueillir 2000 visiteurs (dont 184 fauteuils au balcon) L'acoustique est
excellente et l'espace très agréable avec une fosse entourée de balcons
latéraux sur deux étages et d'une mezzanine au fond dotée de fauteuils. Un
foyer et un bar sont à la disposition du public avec, bien sûr, de l'excellente
bière pour pas cher (nous sommes en Belgique, quand-même hein !).
En 2016, Machiavel venait de fêter ses 40 ans
d'existence, une longévité remarquable qui avait été motivé un concert
mémorable accompagné par l'Orchestre Royal de Chambre de Wallonie que je vous
invite à visionner (https://www.youtube.com/watch?v=Un8X1zTvpFk).
Depuis plusieurs mois (ticket acquis en juillet 2017),
le groupe se préparait donc à ce nouveau concert, exclusivement consacré à ses trois
premiers opus "Machiavel"
(1976), "Jester" (1977), et
"Mechanical Moonbeams"
(1978). Il s'avèrera ce soir qu'ils se sont accordés un petit additif avec trois
autres titres, issus de "Urban Games"
(1979), de "New Lines"
(1980) et de "Break out"
(1981) mettant une touche plus pop à la ligne purement progressive.
La maladie de Mario Guccio, son chanteur depuis 1977, accentuait l'impatience du public
d'assister à cet unique concert sur une longue échéance. Oui mais voilà,
c'était sous-estimer ce crabe qui a trop souvent le dernier mot. Mario Guccio a combattu en vain cette
saloperie. Il est parti à l’âge de 64 ans le 20 janvier 2018.
Il a cependant pris la précaution d'insister auprès de
ses camarades pour le concert soit maintenu. Les deux membres fondateurs, Roland
De Greef (basse, chœur) et Marc Ysaye (percussions, batterie, et chant)
ont donc pris la décision de respecter la volonté de leur ami. Désormais
entouré d'Hervé Borbé (piano et
synthétiseur depuis 1998) et de Christophe Pons
(guitares depuis 2011), Marc a décidé de reprendre le micro (il en était déjà le seul titulaire jusqu'en
1977, après quoi il a continué peu ou prou à chanter) ; c'est Nicolas Scaillet qui assure la batterie. Afin
d'étoffer les parties vocales Marc a eu la très bonne idée de recruter une très
bonne choriste, Lili Gin.
Voilà pour le contexte. Pour le reste, comme d'hab' il
m'est difficile de relater le ressenti. Cette fois les émotions étaient
principalement justifiées bien évidemment par la perte de Mario. Mais Marc a su
rester digne tout en rendant un hommage répété et appuyé. La photo de l'absent
était posée en affiche sur le côté de la scène mais de toutes façons son esprit
était parmi nous.
J'étais placé au tout début en balcon mais très vite
je suis descendu en fosse pour mieux voir et mieux ressentir les émotions du
public.
La sonorisation m'a semblé parfaite, l'éclairage fut
ordinaire mais suffisant. Le fond d'écran m'a semblé sous-employé ; les images
du groupe et des couvertures de disque auraient pu rester plus longtemps, car
en dehors des images de Mario qui s'imposaient bien évidement, le fond restait
immuablement noir. Sans doute pour mieux se marier aux hommes tous vêtus d'un
noir de circonstance…
Très opportunément, les titres ont respecté la
chronologie des opus. Trois titres du premier, six du deuxième et six du
troisième m'ont paru être un excellent dosage, un excellent choix. Il me semble
que ceux-ci rendent bien mieux qu'en studio ; effet sans doute dû à
l'expérience acquise par le groupe depuis quatre décennies et aussi dû à la
présence non-négligeable de la choriste, mais je veux bien admettre une part de
ma subjectivité dans le contexte du concert.
D'anciens membres du groupe ont été invités. Il semble
que Jean-Paul Devaux (guitariste en 1977)
ait décliné l'invitation). En tout état de cause, Jack Roskam (1976) et Thierry Plas
(de 1980 à 2011) ont su justifier leur présence dans l'Histoire du groupe,
apportant chacun leur style et leur sensibilité.
Avant de débuter "After the Crop", Thierry a tenu à rendre lui aussi un hommage
appuyé à son chanteur en citant quelques mots écrits par Mario dans une
nouvelle.
Ce titre a également été entrecoupé d'un solo
remarquable à deux batteries (Nicolas et Marc).
Le point d'orgue du concert fut "Rope Dancer" qui fut précédé d'une
minute de silence suivie de la diffusion sur l'écran de fond de scène du
premier couplet chanté par Mario puis enchainé par le groupe pour le reste de
la chanson. Excellente idée qui accentua encore un peu plus la charge émotive
de la soirée.
Le concert arrive à sa fin, mais il était prévu et
attendu un rappel plus pop et nécessaire pour ne pas se quitter sur trop de
mélancolie. Effet réussi, le public s'enflamme. Le second rappel accentue le
plaisir.
Les musiciens furent tous à la hauteur de l'enjeu,
même si on pouvait observer depuis le balcon que Marc disposait de deux téléprompteurs
pour soutenir sa mémoire. On ne lui en voudra pas compte tenu du contexte
(ancienneté de morceaux qu'il n'a pas toujours chanté et émotion de les chanter
à la place de son ami). Vu de la fosse on ne remarquait rien. Et puis l'homme
est tellement touchant et sincère dans sa démarche que le courant passe sans
problème avec son public.
J'ai été surtout impressionné par le très bon niveau
des guitaristes des trois époques. Le petit con que je suis se demande bien
pourquoi ils ne sont pas restés ; en particulier le remarquable Thierry Plas mais bon, ça c'est leur problème
hein…
PROGRAMME
Johan's Brother Told Me (Machiavel)
When Johan Died, Sirens Were
Singing (avec Jack Roskam) (Machiavel)
Cheerlessness(Machiavel)
Wisdom (Jester)
Sparkling Jaw (Jester)
In the Reign of Queen
Pollution (Jester)
The Jester (Jester)
Moments (Jester)
Mr. Street Fair (Jester)
Beyond the Silence (Mechanical
Moonbeams)
Summon Up Your Strength
(Mechanical
Moonbeams)
Rebirth (Mechanical
Moonbeams)
After the Crop (avec Thierry Plas) (Mechanical Moonbeams)
The Fifth Season (Mechanical
Moonbeams)
Rope Dancer (après une minute de silence et le premier
couplet interprété sur écran avec Mario Guccio
au chant) (Mechanical Moonbeams).
Rappel : (22h05)
Over the Hill (avec Jack Roskam) (Urban Games)
Fly (avec Thierry Plas) (New Lines).
Rappel : (22h15)
Lay Down (avec Thierry Plas) (Break Out).
(fin 22h25)
Petites
frustrations en fin de soirée ; devoir me priver de bière (pour reprendre dans les meilleures conditions la relativement longue
route ensuite) et pas d'échoppe, donc pas de CD (je convoitais deux CD) et
pas de t-shirt… tant pis.
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