Encore un reliquat de la pandémie, cet événement était prévu le dimanche 17 octobre 2021, et la Convention bisannuelle était prévue en mars 2022 ; tous les deux ont été reportés d'un an, mettant ainsi notre patience à rude épreuve. Autant dire qu'avec la parution du splendide album "An Hour Before It's Dark", notre fébrilité avait encore monté d'un cran, cette date automnale était particulièrement attendue !
Rédiger un récit sur mes impressions à l'issue d'un
concert de MARILLION demeure un exercice redoutable pour moi. Je crains
toujours de me vautrer dans le pathétique au dépends d'un partage d'impressions
le plus factuel, à défaut d'objectif possible. Le fait est que ce groupe, à l'instar de quelques
autres, est capable de provoquer en moi des vagues émotives irrépressibles. Leur
Musique est l'une des prescriptions qui soulage le mieux mes tracas du
quotidien. Elle illustre parfaitement le concept de musicothérapie que je prône
depuis toujours.
Ô, je sais bien que ceux qui me connaissent de longue
date pourront m'opposer mon dédain initial durant les années 80 pour ce groupe
avec lequel je ne me suis finalement réconcilié que dans les années 2000 (eh
oui…), par la grâce de Monsieur Steven Wilson. Vieux motard que jamais, ce soir
n'est ainsi que la quinzième fois que j'assiste pieusement à leur concert.
Avec ma p'tite Fée et mon fils, nous parvenons à nous positionner
très correctement en fosse, en centre gauche, à une dizaine de rangs de la
scène. Nous remarquons la présence du guitariste d'OVERHEAD, Jaakko Kettunen et
de sa ravissante épouse que nous avions quitté moins de vingt-quatre heure auparavant.
Une nouvelle occasion pour lui renouveler notre respect admiratif !
Le Zénith est dans son format réduit et pourtant il
est à peine rempli. Certes, les admirateurs français ont eu cette fois l'opportunité
de se répartir sur six dates réparties dans l'Hexagone. Mais quand même, il est
bien navrant de devoir compter sur le renfort d'une brigade d'admirateurs
allemands (arborant fièrement leur
t-shirt "Web Germany, Die offizielle deutsche Marillion Gemeinschaft")
pour tenter de combler les trous. On peine alors à se souvenir de l'époque où
MARILLION remplissait le POP-Bercy … Mais on va estimer que la plupart des plus
sincères dévots franciliens sont ici… Pauvre,
pôôôôvre france.
18h30 : UN DUO IDYLLIQUE
Cette fois, mon "angoisse de la feuille blanche" est soulagée avec
l'opportunité de débuter mon récit par un conte de Fée des temps modernes. Dans le cadre
très particulier du microcosme MARILLION, le romantisme à toute sa place, car
il est favorisé par leur musique et l'émotion qu'elle procure. Et ce soir, nous
en aurons de nouveau une belle démonstration.
Il était une fois, une jolie violoniste bruxelloise
qui faisait partie d'IN PRAISE OF FOLLY, un quatuor de cordes recruté par MARILLION pour les accompagner en concert. Maia Frankowski s'épanouit pleinement en accompagnant les anglais
lorsqu'elle rencontre son prince charmant, l'artiste folk britannique Harry Pane… Ils ont été réunis par un beau
coup du sort ; le couple s'est rencontré sur scène lors d'une tournée
européenne. Leur première collaboration, le monoplage "Time", est sorti en 2020 sous le
nom de "Harry Pane feat. Maïa Frankowski". Ils créent ainsi le duo JUNE
ROAD, un mélange indie folk exprimant de riches harmonies vocales, à la guitare
et au violon. Leur biographie nous décrit "une alchimie entretenue par une
passion commune pour les voyages". Le duo est désormais basé à Bruxelles
où leur écriture et leur relation s'épanouissent. Bref, dans la pure tradition
de sincérité, limite candeur, typiquement belge, la jolie princesse a même clamé
à notre assemblée que leur Amour sera sacré par le mariage ! C'est bô, l'Amoûr
!
Les parrains de cette belle union ont eu la bonne idée
de recruter le couple de tourtereaux pour ouvrir leurs soirées du 16 octobre au
9 novembre.
Nous avons déjà eu l'occasion d'assister à deux
concert d'Harry Pane, à chaque fois à l'invitation de MARILLION ; le premier
lors de la Convention le 26 mars 2017, puis une deuxième fois à Pleyel le 9
décembre 2019. Prétendre qu'il m'avait laissé un souvenir impérissable serait
un abus de langage, m'enfin son entrain et son grain de voix ont toujours
permis de passer un bon moment. Quant à sa protégée, nous l'avons écoutée à
chaque fois qu'IN PRAISE OF FOLLY accompagnait MARILLION ; depuis le 26 mars
2017, depuis que cette formation musicale nous était apparue déguisée en costumes
(18e s) pour interpréter les titres de l'album ".com".
Bon, c'est pas le tout, mais ça donne quoi au final ?!
Eh bien c'est ma foi très, très bien fait ! Le violon endiablé et les accords
très rythmés à la guitare sèche forment une belle unité entrainante. Je ne
connais pas leurs références, mais leur état d'esprit et leur expression
musicale nous a plu. Des mélodies énergiques et/ou douces ont contribué
agréablement à nous faire patienter avant la Grand' Messe. Je ne traverserais pas l'Europe pour aller les voir, mais disons que je passerais bien une soirée
en leur compagnie (enfin, pour être
honnête surtout celle de la belle Maia) dans un bar.
19h30 : UN QUINTETTE MAGIQUE
L'entrée sur scène de Steve Rothery (guitares, depuis 1979),
Mark Kelly (claviers, depuis 1981),
Pete Trewavas (basse, chœurs, depuis
1981), Ian Mosley (batterie, depuis
1984), et Steve Hogarth (chant,
clavier, guitare et percussion, depuis 1988) restera toujours un moment
d'intense émotion qui dénonce une réelle communion d'esprit entre les artistes
et leur public. Ce soir, un sixième membre est présent sur scène ; le
percussionniste Luis Jardine. Son
pedigree montre sa participation aux enregistrements parallèles de H, ainsi
qu'au dernier album de MARILLION.
"An Hour
Before It's Dark" paru le 4
mars 2022 pourrait être considéré comme le vingtième opus, mais ce serait en
considérant que l'acoustique "Less
is More" et que l'orchestré "With
Friends…" seraient des albums à part entière, et qu'en revanche les deux
volumes "Happiness Is the Road"
ne formeraient qu'un opus, ce qui me semble discutable… Bref, quoi qu'il en soit
c'est par ce somptueux album que débute mon quinzième concert.
Nous avons pu sans difficulté conserver notre emplacement,
nous sommes en présence d'un public respectueux et unanime pour communier (j'ignore volontairement l'intrusion d'un ou
deux parasites discourtois qui sont en retard sans l'assumer ; ils sont fort
heureusement bien moins nombreux ici qu'ailleurs, tel est le sens de mon propos
!). De là, nous pourrons observer Pete, placé devant Ian, sur notre gauche,
et H sur notre droite. Steve est positionné devant Mark, sur la droite.
Une acoustique et une sonorisation excellentes nous
permettent de retrouver immédiatement la Porte vers l'Univers magique !
L'intégralité de l'album défile et ne fait que
confirmer tout le bien que nous en pensions depuis notre salon. Quelle
magnifique Création ! Un recueil à la fois sombre, lumineux, poétique aérien,
dynamique et émouvant. Toute une palette d'émotions exprimées avec conviction
par ce grand comédien qu'est Steve Hogarth.
Ce chanteur au timbre si sensible et expressif est vraiment doté d'un charisme exceptionnel.
"The Crow
and the Nightingale" était et restera je pense mon titre préféré de
l'album. Il a su une nouvelle fois tirer les larmes de mes yeux, déjà embués
par ce qui précédait ! L'usage de bandes-son a habituellement le don de
m'agacer, néanmoins cette fois j'admets volontiers que les sonorités
bouleversantes du Choir Noir aurait
manqué à l'ambiance du titre… La ferveur de l'auditoire a encore monté d'un
cran !
Steve Rothery,
l'immense guitariste, digne fils spirituel des D. Gilmour, A. Latimer et autre
M. Knopfler, reste une source d'admiration infinie. Son inquiétant embonpoint
ne semble pas gêner ses sensibles touchers qui transcendent les harmonies du
groupe. Ces soli admirables accentuent les sentiments déjà puissamment exprimés
par la musique.
Pete Trewavas,
m'a semblé bénéficier d'un son particulièrement efficace qui m'a permis
d'admirer une nouvelle fois son jeu, ses accords comme cet ostinato introductif
entêtant sur "Murder Machines".
Ces chœurs généreux en soutien à H accentuent son statut de pilier fiable.
Mark Kelly,
le garant des ambiances aérées et des atmosphères somptueuses nous faire vivre
ses superbes progressions de textures sonores, notamment sur "The Crow and the Nightingale" (eh
oui, encore ce titre !).
Ian Mosley
ne revendique ni originalité, ni exubérance ; il met à profit toute sa longue
expérience pour garantir les rythmes requis et il le fait avec tact et
précision.
Ces cinq artistes conjuguent leurs talents avec une
force, une authenticité et une sincérité qui leur confère le rang de maîtres de
la scène néoprog. Le chant habité de H, la délicatesse des interventions de
Steve Rothery alliée à celle de Mark Kelly, et la base basse/batterie astucieusement
dosée mais suffisamment puissante pour assurer le voyage de l'auditeur ; tout est équilibre, source de plaisir
auditif et d'évasion spirituelle. L'apport des percussions de Luis Jardine a encore ajouté une touche
d'épices très agréable à l'ensemble. Agréable, mais pas indispensable à mon
sens ; s'il devait y avoir un choix à faire, j'opterais pour le retour de
l'orchestre. Mais je concède volontiers que le coût de revient n'est pas le
même !
Faire plaisir, rendre les gens heureux semble
l'objectif absolu de MARILLION ; très attentionnés pour leurs admirateurs (je
peux en témoigner avec une certaine émotion, depuis les Conventions !), ils le
sont aussi pour leur proches. Aujourd'hui c'est l'anniversaire de Nial HOGARTH,
fils de Steve et accessoirement assistant technique ; il est prié de venir, une
fois n'est pas coutume, sur le devant de la scène pour accepter un opportun gâteau
piqué de ses bougies. Evidemment, le public toujours aussi spontané, solidaire
et émotif entonne LA chanson adéquate !
Il n'y a pas d'entracte avant une deuxième partie de
soirée durant laquelle MARILLION interprète cinq titres d'une période comprise
entre de 1994 à 2007, dont trois sont issus de "Brave" (1994), un de "Somewhere
Else" (2007) et un de "Afraid
of Sunlight" (1995). Le poignant "The Great Escape" clôt le concert avant les rappels évidemment
attendus.
L'enthousiasme du public est total, bien évidement. Il
est vrai qu'il serait difficile de trouver un titre qui déçoive l'auditeur en
concert…
Le groupe ne tarde pas à revenir pour nous accorder
les quatre séquences du fabuleux "The
New Kings", titre issu de "F E A R" (2016). Alors que depuis
le début il était engoncé dans un costume oppressant, H revient vêtu d'autre
costume… qui nous parait toujours aussi inadapté à sa mobilité et à la
température scénique !
Un second rappel achève d'exalter les plus anciens
adeptes avec "Sugar Mice" !
H est vêtu d'une veste plus légère cette fois !! Je suis toujours ému/frustré
de voir mes co-mélomanes chanter les paroles, en particulier le refrain, à
l'invitation de H qui leur tend son micro. Je ne devrais plus me contenter de
lire (et d'essayer) de comprendre les textes, il me faudrait aussi les retenir
(hypocrite vœu pieu !) …
21h30 : Les
musiciens, souriants et reconnaissants, quittent la scène avec une intense
ovation, après avoir délivré deux heures
de bonheur intense. Les lumières se rallument pour nous ramener brutalement
à la réalité de cette fin de soirée.
A peine le temps
de partager nos émotions que déjà les videurs nous indiquent la sortie.
PROGRAMME :
ACTE I : An Hour Before It's Dark (2022)
Be Hard On
Yourself (II) Lust for Luxury
Be Hard On
Yourself (III) You Can Learn
Reprogram
the Gene (I) Invincible
Reprogram
the Gene (II) Trouble-Free Life
Reprogram
the Gene (III) A Cure for Us?
Only a Kiss
Murder
Machines
The Crow
and the Nightingale (Choir Noir, choeur
enregistré)
Sierra
Leone (I) Chance in a Million
Sierra
Leone (II) The White Sand
Sierra
Leone (III) The Diamond
Sierra
Leone (IV) The Blue Warm Air
Sierra
Leone (V) More Than Treasure
Care (I)
Maintenance Drugs (h on cowbell)
Care (II)
An Hour Before It's Dark
Care (III)
Every Cell
Care (IV)
Angels on Earth.
ACTE II :
Somewhere
Else (Somewhere Else, 2007)
Wave (Brave, 1994)
Mad (Brave, 1994)
Afraid of
Sunlight (Afraid of Sunlight, 1995)
The Great
Escape (Brave, 1994).
RAPPEL :
The New
Kings: I. Fuck Everyone and Run (Fuck
Everyone and Run (F E A R), 2016)
The New
Kings: II. Russia's Locked Doors
The New
Kings: III. A Scary Sky
The New
Kings: IV. Why Is Nothing Ever True ?
RAPPEL 2:
Sugar Mice (Clutching at Straws, 1987).
Je jette un coup d'œil à l'échoppe, mais je reste
sage. Dans environ 150 jours, nous aurons l'occasion de nous ruiner à l'échoppe
de la Convention !
L'atterrissage est lent. Nous sommes une quinzaine à
convenir de nous retrouver autour d'une table de bistrot, histoire de prolonger
cette parenthèse de bonheur dans un monde de brutes.
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