Il me serait bien difficile d'argumenter mon attirance
pour Rammstein : comme quelques autres groupes que j'apprécie, je n'y décèle
pas de virtuosité particulière, ni de subtilité romantique dans les mélodies, ni
de cette complexité musicale que je recherche tant par ailleurs. On aime ou on
n'aime pas, point. J'ai moi-même tardé à tomber dans la marmite, car bien que
germanophile depuis toujours, je me méfiais de ces personnages plus
qu'inquiétants, a priori…
De prime abord, ils ne donnent pas le sentiment de
faire dans la fine dentelle. Et pourtant, il s'avère qu'en dépit de leur
attitude provocatrice, cynique et désinvolte ce sont de vrais artistes ; ils savent
jouer avec les images, les sons et les mots. Leurs vidéos sont réalisées avec
un soin cinématographique, le son et la production de leurs albums sont soignés,
et leurs textes germanophones sont souvent ambigus, à double sens. Ils savent
de surcroît s'entourer de vrais professionnels, tant pour l'élaboration des
vidéos, que pour les extraordinaires spectacles de scène, durant lesquels la
pyrotechnie est poussée à un paroxysme dont se souviennent toujours les
spectateurs, en particulier ceux des premiers rangs !
Pourtant pourfendeur des excès sonores, des voix sans
qualité, et des pré-enregistrements, j'ai commencé à me pencher au-dessus de
ladite marmite par le biais d'autres mélomanes vers les années 2000. C'est
lamentable, et je n'assume pas vraiment, en fait. Mes scrupules sont comparables
à ceux générés par Ghost. Me voilà maintenant en train de mijoter avec des
milliers de pauvres diables complètement écervelés, dès que des rythmes
binaires résonnent dans les stades…
Car en effet, pour promouvoir leur septième opus,
sobrement intitulé "Rammstein",
les allemands ont décidé de se lancer dans une tournée des stades. Ce fut pour
moi l'occasion d'inaugurer cette salle encore récente, (faute d'avoir pu assister aux concerts des Rolling Stones et de Roger
Waters).
L'intérieur de l'arène surprend, fatalement. C'est
juste énorme. On se doute déjà que ce sera une belle aire de jeux pour ces
pyromanes. … Me voilà donc placé au fond du U en gradin relativement haut situé
(putains d'escaliers pour y arriver, la
vache !!!), mais parfaitement en face de la scène. Puisque je suis dans le
prolongement de console du son, je peux prétendre à disposer d'une bonne
acoustique. Mais de cela, on en reparlera…
DUO JATEKOK[20h-20h35].
Admirable audace que d'imposer au public une première
partie aussi surprenante. Deux pianistes françaises, Adélaïde Panaget et Naïri Badal, qui ont fondé en 2007 Duo Játékok, ont le redoutable privilège
de devoir chauffer les stades durant toute la tournée des terrifiants teutons,
devant leur horde assoiffée de sons et de feux !!! Certes, leur baptême avait
déjà été accordé en 2017 aux Arènes de Nîmes, mais de là à oser une tournée à
travers toute l'Europe…
Elles baignent habituellement dans le milieu classique
et semblent cependant apprécier ce public de metallos turbulents. En tous cas
c'est ce qu'elles prétendent…Ceux qui ne sont pas réceptifs en profitent pour
se désaltérer, vider ce qui est déjà ingurgité, ou encore pianoter sur les
écrans. Mais globalement les filles s'adressent avec la franchise et avec l'aplomb
de leur talent à un auditoire respectueux (hormis
un imbécile pas loin de moi qui n'a pu s'empêcher de beugler un "à
poil" à la hauteur de son intellect).
Pour ma part, je suis heureusement surpris, je réalise
que le soutien des allemands à cette vraie gageure est parfaitement justifié. En
fait, elles reprennent huit des titres de RAMMSTEIN, extraits d'un album
intitulé "Klavier". Le plus
souvent interprétées à quatre mains sur un piano, les reprises sont crédibles et
même parfois émouvantes ("Frühling
in Paris" repris en chœur par le public).
Après ce moment de délicatesse, les lumières se
rallument pour laisser apparaitre une fosse qui peut sembler encore clairsemée
peu avant 21 heures. Impression accrue par l'évitement des trois estrades
techniques qui font obstacle à la vue sur la scène.
RAMMSTEIN [un peu plus de deux heures]
Il est 21 heures, les lumières sont éteintes, et les
dernières mesures d'une musique baroque laissent la place à une terrifiante
explosion qui réveillerait tous les morts du quartier.
Je retrouve ainsi un groupe fidèlement lié (rare qualité !) puisque depuis 1994, Till Lindemann (chant), Richard Zven Kruspe (guitare, chœurs), Christoph "doom" Schneider (batterie), et Oliver "Ollie" Riedel (basse) restent entourés de Paul Landers (guitare, chœurs) et Christian "Flake" Lorenz (claviers). Cela faisait sept années que je les avais vus à Bercy, trois années au Download Festival Paris.
Etonnant choix, c'est le lourdaud "Was ich liebe" qui débute le
spectacle. Très vite, je m'inquiète cependant pour la sonorisation. Alors que
durant mes derniers concerts je pouvais de nouveau me passer de protections
auditives, là c'est juste pas possible… La basse et la batterie sont juste
assourdissants ; cela s’avérera un calvaire quasi permanent. Le point culminant
de ce catastrophique déréglage des balances sonores sera "Mein Teil" qui fut tout simplement
une bouillie infâme ; il me fallut regarder la mise en scène (particulièrement
identifiable) pour reconnaître la chanson !
Le plaisir escompté ne pouvant venir de mes oreilles,
je me résous à miser sur mes yeux. Fort heureusement, je n'avais pas omis mes
lunettes, mais j'aurais toutefois été bien inspiré d'emmener mes jumelles.
L'éclairage permanent était relativement sombre. Ce qui, dans une aussi grande
salle peuplée de lilliputiens (autant sur
scène qu'en fosse) ne laissait pas beaucoup de chose à regarder, d'autant
moins qu'il manquait à mon humble avis deux écrans latéraux. Un seul minuscule
écran central diffusait des images, de temps en temps, et encore, rarement pour
montrer les musiciens… Pour le reste, la mise en scène est quand même assez
magnifique ; à la fois sobre et grandiose. Les jeux de lumières donnent parfois
du volume de fort belle manière.
Mais bien entendu c'est dans le domaine de la
pyrotechnie que ces gros malades restent champions, et le public aura ressenti
de nombreuses vagues de chaleur intenses ! Maitrisés et inspirés, ces jeux de
flammes contribuent indéniablement à impressionner l'auditoire. Lance-flammes,
bouches de feu, artifices en tous genres atteignent leur somment sur les titres
"Mein Teil" (la marmite
incendiée au lance-flammes), "Puppe"
(un gigantesque landau en flammes), et surtout sur le somptueux "Du hast". Durant ce titre, le
spectacle s'est encore étoffé par rapport à la dernière tournée ;
l'aller-retour de flamme est ponctué d'un puissant et énorme jet de flammes
au-dessus des deux estrades techniques sur les côtés arrières de la fosse, ce
qui n'aurait pas été possible dans un plus petit espace… Mais après ce déluge
de feu, les fumées peinent à s'évacuer. La scène s'en trouve désormais à peine
visible depuis nos gradins… Les deux titres qui suivent sont ainsi totalement
dans le brouillard, à la fois sonore et visuel. C'est le bouquet !
Après une pause dans cette descente aux enfers, le
rappel survient sur une estrade installée comme un ring en fosse, plus proche
de nos gradins, donc. Néanmoins, on peine encore à distinguer le Duo Játékok
qui les accompagne pour interpréter "Engel",
que le public reprend d'autant plus volontiers en chœur qu'il pouvait suivre
les paroles diffusées en fond de scène. Mais en revanche, dans cette
configuration, on se privera du fameux ange mécanique et flamboyant qui était
porté par Till durant les précédents concerts.
Ensuite, la fumée étant encore très dense, on peine
également à les distinguer flotter sur la foule à bord de leurs canots
gonflables pour rejoindre la scène.
Puis l'entrainant "Auslander" transforme une nouvelle fois l'arène en boite de
nuit. Un peu plus tôt dans la soirée, "Deutschland"
fut précédé d'un interlude dansant, remix du titre… Ils ont ce côté électro que
j'aime bien. "Du richst so gut"
fut un des rares moments très agréables et efficaces pour moi. "Pussy", en dépit de son canon à
mousse, retomba dans la bouillie sonore inaudible … Le second rappel fut dans
la même veine, et j'avais hâte de respirer l'air pur.
J'attendais avec envie ce concert mais, en dépit du
gigantisme, je suis moins enthousiaste qu'après celui de Bercy. Il faudra que
quelqu'un explique à l'usurpateur du poste d'ingénieur du son que sur les
quarante mille personnes présentes beaucoup n'auront pas apprécié sa notion des
équilibres… Après discussions je m'aperçois en effet que je ne fus pas le seul
à m'en plaindre, y compris parmi les spectateurs du second spectacle du
lendemain. Il faudra aussi que les pyrotechniciens se rappellent que s'il n'y a
pas de fumée sans feu, l'inverse est également à prendre en compte (keuf,
keuf…) !
Il n'en demeure pas moins que RAMMSTEIN reste un
groupe qui ne lésine pas sur les moyens déployés à grande échelle, avec une
rigueur et une efficacité typiquement germanique. Je leur conserve toute mon
estime, mais disons que ce soir les flammes étaient plus sur la scène que dans
mon esprit…
Immanquablement, lorsque je me rends à un concert de
Magma des images me reviennent en mémoire. Dans les années 70, lorsque je
prenais le métro, (j'avais une douzaine
d'années) j'étais toujours intrigué par les affiches publicitaires qui en annonçaient
les concerts : je me souviens du regard troublant de Christian Vander, des
images évoquant l'incandescence des spectacles ou encore l'emblème inquiétant
du groupe. Les rares apparitions à la télévision ne faisaient qu'entretenir une
impression de mystères.
Impression délibérément entretenue par un style de
musique indéfinissable et une langue kobaïenne hermétique aux non-initiés.
Ajoutons pour faire bonne mesure que pas moins de 170 musiciens ont apporté
leur contribution depuis ses débuts ! On peut relever les passages de Didier
Lockwood, Michel Graillier, Jannick Top ou Simon Goubert entre autres. Le Magma
sembla s'éteindre à partir de 1984 pour nous proposer Offering, mais Vulcain en
décida autrement puisque depuis 1996 avec une nouvelle formation, la lave
incandescente continue de se déverser dans les auditoriums du monde entier.
Magma fête ainsi ses cinquante ans cette année !
L'annonce de ce concert, surtout dans cet écrin musical, ne pouvait donc que
m'inciter à les revoir une sixième fois. Je ne peux qu'afficher cinq autres
concerts depuis 2014 car j'ai longtemps mis de côté l'étude de la Zeuhl, ce bien étrange et atypique
univers. Il me fallut rencontrer une Fée (Sandrine) en 2012 puis le passionné (Robert)
un peu plus tard, pour enfin me lancer à la découverte…
Prétendre que j'ai trouvé la Porte immédiatement
serait inexact. Mais, à défaut de voyager complètement, je suis cependant
toujours parvenu à distinguer les talents individuels lors des prestations. Chaque
pupitre étant tenu par des musiciens qui m'ont toujours semblé investis et
admirables. Cet intérêt croissant m'a permis de tenir jusqu'à ce soir, durant
lequel je suis enfin parvenu à trouver une Porte ; l'alignement des planètes,
sans doute.
Pour cet accès à Kobaïa, j'étais ravi de pouvoir me
positionner au premier rang, appuyé à la scène, face au pupitre de la basse, car
il me plait de suivre les regards et les sentiments sur les visages, pour les
conjuguer à la musique. Mais j'imagine aisément que dans ce magnifique
auditorium il n'y avait pas de mauvais emplacement ! Les trois mille six cents
spectateurs auront tous eu leur part de bonheurs.
Ce choix d'emplacement devait être assumé pour une
soirée de 3h30 prévue en trois actes et cinq pièces, soit pour 2h25 de musique !
Nous retrouvons donc Christian Vander (batterie et chant), entouré de sa garde fidèle : Stella Vander (chant), Isabelle Feuillebois (chant), Hervé Aknin (chant), Philippe Bussonnet (basse), Benoit Alziary (percussions, vibraphone),
ainsi que Jérôme Martineau (clavier)
et Rudy Blas (guitare).
L'évènement se devait d'être marqué par un soutien
musical particulier ; plusieurs musiciens (souvent issus de la scène jazz)
viendront participer. Bruno Ruder
(piano), Simon Goubert (piano),
Morgan Agren (batterie). Un chœur
pour soutenir les trois titulaires : Julie Vander,
Sylvie Fisichella, Sandrine Destefanis, et Laura Guarrato. Ainsi qu'un orchestre composé
de Rémi Dumoulin, (saxophone,
clarinette, flûte) Yannick Soccal,
(flûte, saxophone soprano, saxophone ténor), Jean-Baptiste Réhault (saxophones), Sylvan Bardiau,
Sébastien Mitterand (trompettes) et William
Becuwe (trombone).
Voilà pour les protagonistes, qui se sont investis
corps et âmes pour produire un concert qui marquera indéniablement les esprits
des musiciens et de l'auditoire. Car manifestement l'émotion fut à son comble à
la fin du concert ; les musiciens se sont congratulés avec une énergie qui
trahissait un fort soulagement après de longues répétitions mais aussi une
grande satisfaction, partagée par le public ravi et particulièrement enthousiaste.
Chacun aura retenu tel aspect, ou tel musicien selon
sa sensibilité ; pour ma part je me permets juste de confirmer toute mon admiration
pour le bassiste Philippe Buissonnet
qui n'en finit pas de me subjuguer par son talent, sa constance, sa modestie et
son efficacité.
Je me garderai bien de détailler l'exécution des
morceaux, car la musique de Magma, plus que toute autre, se vit davantage
qu'elle ne se lit et davantage aussi qu'elle ne s'écoute dans son salon. C'est
une expérience musicale, un moment intense que je suis heureux d'avoir pu
vivre, comme beaucoup de mes amis présents.
Il convient juste de souligner l’événement majeur de cette
soirée que constitue l'interprétation de Zëss.
Cet opus de près de quarante minutes vient d'être enregistré dans sa version
définitive, en 2018 en compagnie de l'orchestre Philharmonique de Prague. La
création de cette œuvre débuta en 1977 et les premières interprétations
partielles furent exécutées sur scène à partir de 1979, puis sous une forme
plus développée en 1981. Pour ma part, c'est une découverte ; son introduction
instrumentale, me parait assez surprenante. Sur une base au piano et chœurs, la
partie déclarative est en français et exprimée par Christian Vander, qui avait
cédé sa batterie au suédois Morgan Agren.
Cette phase étonnante laisse ensuite s'exprimer une orchestration qui m'a vite
enthousiasmé ; même Rudy Blas a pu
s'exprimer lors d'un long solo bien rock.
Ce troisième acte de la soirée ne pouvait qu'enflammer
un public qui attendait tout particulièrement ce moment.
Le rappel s'impose avec évidence. Le choix du groupe
se porte sur "Ehn Deïss",
un titre plus apaisé et mélancolique introduit par Stella Vander.
On me dit qu'à l'Olympia en février 2017, avec
notamment la présence de Didier Lockwood, le groupe s'était également
surpassé... Mais de l'avis unanime ce soir, ce concert du cinquantenaire
restera mémorable aussi.
Lorsque la première édition
du festival s'est tenue le 24 juin 2017 (avec une affiche déjà très
alléchante ; Anathema, Gazpacho, Pain of Salvation, Matin, et Caligula's Horse),
je n'avais pas pu m'y rendre car elle tombait le même jour que le Retro C Trop.
Pour la deuxième édition,
le 23 juin 2018 (avec de nouveau une très belle affiche ; Amplifier, Lazuli,
Lesoir, Riverside, The Gathering), j'avais préféré me rendre à Clisson pour
le Hellfest. Dilemme récurrent pour moi qui écoute les deux styles de musiques
au gré de mes humeurs. Étonnamment, ces 407 km qui séparent Valkenburg de mon
domicile, constituent une distance équivalente à celle du Hellfest.
L'affiche de cette troisième
édition étant encore une fois séduisante, j'ai donc décidé de contrarier
l'adage ; il y aura bel et bien eut un "deux sans trois". Ce sera aussi
notre premier festival de l'été 2019 !
Notre voyage aboutit dans
cette très jolie ville de la province du Limbourg néerlandais. L'atmosphère y
semble étonnamment apaisée ; le vélo est roi, le piéton prince. Nous esquissons
quelques pas dans ces rues piétonnes propres, agréables et commerçantes qui
nous donnent très envie de visiter la cité, mais nous ne pouvons tarder.
Un petit chemin mène au
sommet d'une butte couronnée par l'entrée du site où l'accueil réglementaire se
montre bienveillant. Nous découvrons alors un amphithéâtre merveilleusement
enclavé dans un écrin de verdure et de roche. Les gradins surplombent une scène
qui est couverte d'un toit imitant de grandes feuilles qui me rappellent les
décors du film "Arthur et les Minimoys". En surplomb se trouve
l'échoppe officielle, et sur le côté les échoppes de restauration. Bonne
surprise, la délicieuse bière d'abbaye
belge Tongerlo est servie à la pression et dans le calice en verre adéquat
! Je trouve cela surprenant car Anvers est de l'autre côté du plat pays, mais je
suis au paradis !
L'auditorium, qui peut
contenir 850 personnes, est déclaré complet depuis la veille.
Nous sommes arrivés à
l'ouverture des portes, vers midi, et pourtant, grâce à des amis arrivés avant
nous, nous pouvons nous asseoir … au premier rang. Cet extraordinaire privilège
nous permettra de jouir d'une appréciable proximité avec les artistes. Ma
crainte de souffrir de la sonorisation s'est vite dissipée car elle s'avèrera raisonnable.
SAMEDI 22
JUIN 2019
12h30-13h15 : THE
INTERSPHERE. A l'instar du défunt BeProg, le Midsummer joue avec les
capacités d'écoute des progueux les plus bienveillants ; ce que nous
considérons (ou pas) comme du rock progressif est encore un sujet de débat… Ces
quatre allemands, Christoph Hessler
(chant), Thomas Zipner (guitare),
Daniel Weber (basse), et Moritz Müller (batterie), se sont connus à la
"Mannheim Pop Academy" ; ils formèrent "Hesslers" en
2006, du nom du chanteur Christoph Hessler. Depuis 2009, ils se sont rebaptisés
Intersphere.
Ce concert contribue à une tournée promotionnelle de leur opus "The
Grand Delusion" paru en 2018. Je l'ai découvert après l'annonce de
l'affiche. Il m'a semblé plutôt intéressant sans vraiment m'enthousiasmer non
plus. Les sonorités "heavy prog" me rappellent Caligula's Horse,
Baroness, voire parfois le stoner à la Danko Jones.
Néanmoins, ils ont la redoutable mission de débuter les festivités.
Rien que pour cela nous leur devons au moins une écoute bienveillante.
Leur concert ne remet pas en cause mes premières impressions ; leur
style me parait dépourvu de ces caractéristiques que je cherche dans le rock
progressif. Une musique certes relativement mélodique (d'ailleurs je cherche
encore la provenance des quelques sons de clavier…) mais avec peu de
subtilités, peu de ruptures, quelques soli mais des rythmes très énervés… En
fait, ils me sembleraient davantage à leur place sur une scène d'un Download,
voire d'un Hellfest.
Mais bon, on se sera satisfait de ce sympathique apéritif, d'autant que
dans leur genre ils n'ont pas démérité.
PROGRAMME
Don't Think
Twice (The Grand Delusion, 2018)
Mind over
Matter (The Grand Delusion, 2018)
Man on the
Moon (The
Grand Delusion, 2018)
Secret Place (The Grand
Delusion, 2018)
I Have a Place
for You on Google Earth (Interspheres >< Atmospheres, 2010)
13h45- 14h45 : JOLLY.
Leur histoire nous raconte que ces new-yorkais, Anadale (chant, guitare), Joe Reilly
(claviers), Louis Abramson
(batterie), et Anthony Rondinone
(basse, choeurs) se sont réunis en 2006 grâce à internet, par le biais de forums.
En dépit d'un style difficilement classable, ils semblent recueillir davantage
les faveurs des mélomanes du rock progressif. Pour ma part, je les ai
découverts sur la scène de Divan du Monde le 20 mars 2013, alors
qu'ils assuraient la promotion du second volume de "The Audio Guide To
Happiness". Ils étaient invités en première partie du concert de
Riverside. J'avais alors été suffisamment séduit pour me procurer les deux
volumes du concept.
Je les attends donc aujourd'hui avec un certain plaisir. Notons qu'un
quatrième opus intitulé "Family" parait cette année. Deux
titres seront présentés aujourd'hui.
Avec Jolly, je retrouve ces ambiances progressives avec ces ruptures et
ces envolées lyriques qui m'enthousiasment tant. Leur prestation me semble
audacieuse pour ce concert en plein air, de surcroit à la suite d'un groupe
davantage énervé. Leur musique alterne des rythmes lents et lourds ("Lazarus"),
avec d'autres plus enjoués ("Joy"), avec une bonne maîtrise
des sonorités.
Seul bémol à mes oreilles, ils me semblent qu'ils abusent un peu des
bandes-son ; elles soutiennent des atmosphères qui me paraissent d'autant plus dispensables
lorsqu'il s'agit de voix ou lorsque le clavier pourrait créer les mêmes sons.
Mais reconnaissons que Jolly n'a pas l'apanage de cet artifice, et cela ne
masque aucune incompétence ; ces musiciens entretiennent malgré tout un
sentiment de maitrise. Anthony Rondinone, doté d'une basse aux cordes aux couleurs
fluo est un peu plus démonstratif et plus souriant que ses complices, mais au-delà
de cette agitation, de nombreux accords m'ont paru impressionnants.
Je n'ai pas su retrouver les mêmes sensations qu'en 2013, sans doute
parce que nous sommes cette fois sous le soleil batave et en plein air, mais j'ai
trouvé leur programme assez audacieux pour être respecté et apprécié. D'ailleurs,
le public de mélomanes avertis leur a accordé une belle ovation méritée. Je les
reverrai avec plaisir…
PROGRAMME
Lazarus (Space Masala) (Family, 2019)
Joy (The Audio Guide to Happiness (Part 1), 2011)
Where Everything's Perfect (The Audio
Guide to Happiness (Part 1), 2011)
Lie to Me (Family, 2019)
The Grand Utopia
(The Audio Guide to Happiness (Part 2),
2013)
Escape From DS-3
(Forty-Six Minutes, Twelve Seconds of
Music, 2009)
Storytime (The Audio Guide to Happiness (Part 1), 2011)
The Pattern (The Audio Guide to Happiness (Part 1), 2011).
15h30-16H40 : FOCUS. N'oublions pas que nous sommes aux Pays-Bas, il était donc
de bon aloi d'accueillir un groupe du pays. La présence de Focus, groupe batave
légendaire mais constant, fondé en 1969 par Thijs van Leer, à Amsterdam, ne
pouvait que me réjouir, car la Convention biennale de Marillion, en mars
dernier, m'avait déjà permis de vérifier le talent de ces brisquards !
Je retrouve donc avec
plaisir Thijs van Leer (71 ans, claviers,
flute, chants depuis 1969), Pierre van
der Linden (73 ans, batterie, percussion depuis 1971), Menno Gootjes (guitare, chœurs depuis 1998), et
Udo Pannekeet (basse depuis 2016).
Ils ont choisi un programme
se limitant aux débuts de leurs années 70 ; rien de très novateur donc. Mais
c'est bien connu c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures confitures.
En fait, je me suis régalé encore davantage qu'en mars dernier ! Peut-être
parce que j'étais ici très proche des musiciens et particulièrement de Udo (le
bassiste) dont j'ai pu admirer la virtuosité. Gestes sobres (il n'est pas du
genre à courir aux quatre coins de la scène) mais d'une redoutable
perspicacité. J'ai apprécié également les accords de Menno, incisifs et exprimés
avec une belle sensibilité. Il met en outre en valeur une fort jolie guitare,
soit dit en passant ! Quant à Pierre (le batteur), il m'a inspiré le même
sentiment qu'en mars ; certes il faut lui reconnaitre une bonne technique et
une endurance étonnante mais bon, disons que son solo rituel de 5mn 20s
gagnerait à être écourté…
L'observation de Thijs est
de nature à inquiéter ; lorsqu'il bouge de son périmètre ses articulations
semblent lui peser. Mais fort heureusement sa dextérité est intacte lorsqu'il
s'exprime avec un instrument ; il est capable de jouer sur son orgue d'une main
et assurer l’enchaînement avec une de ses flûtes traversières, ou avec son
chant.
Ce pur moment de bonheur, passé
trop vite, aura duré une heure dix. Il a été stoppé net par une coupure
inopinée (?) de courant, mais sinon j'imagine que le papy serait bien resté sur
scène quelque peu ! De toute façon le temps qui lui était imparti était écoulé.
J'aurais aimé conserver davantage de vidéo de la prestation, et notamment un
passage magnifique à la basse. Je n'ai, pour ma part, filmé que le dernier
titre, mais les caméras présentes ont d'autres plans à dévoiler à mon humble
avis.
PROGRAMME
House of the King (In and Out of Focus, 1970)
Eruption (Focus II, Moving Waves (1971))
Sylvia (Focus III, 1972)
Hocus Pocus (Focus II, Moving Waves (1971)).
17h15 - 18h30 : FLOWER
KINGS, revisted. Roine Stolt a
fondé Flower Kings en 1994. Il semblerait que ces derniers temps l'ambiance au sein
du groupe ne soit pas des plus sereines puisque Roine a cru devoir tamiser
l'éclat de sa fleur en ajoutant l'énigmatique mention "revisited",
au nom du groupe qu'il a pourtant créé… Et pourtant, de Flower Kings nous
retrouvons bien, outre Roine Stolt
(guitare, chants depuis 1994), Hasse Fröberg
(chants, guitares, depuis 1994), et Jonas Reingold
(basse depuis 1999). J'ignore le motif de l'absence des deux autres, et je ne
comprends pas dans quelle mesure cette absence pourrait être de nature à interdire
à Roine d'user légitimement du nom. La batterie est tenue désormais par Mirkko de Maio, le clavier par Zach Kamins. Mystère, mystère, en tout état
de cause, le programme est extrait du répertoire de Flower Kings et l'esprit me
semblera parfaitement respecté.
Leur rock progressif m'a toujours paru un peu difficile d'accès. Un
style plus proche de Yes voire de King Crimson par la complexité des harmonies,
avec peu ou pas de mélodie émergeante. J'écoute donc parfois cette musique comme
un mélomane curieux, avec davantage d'admiration respectueuse que de réel
ravissement. Je mise cependant sur cette prestation scénique pour emporter mon
adhésion.
Nonobstant ces états d'âmes, ce soir mon esprit est à la fête ; leur
musique me touche bien au-delà de mes espérances. Ces soixante-quinze minutes
de concerts sont une fois de plus passées bien trop vite ; il faut dire que les
chansons durent en moyenne une quinzaine de minutes. Si les chants et guitares
de Roine et Hasse contribuent largement à ma satisfaction, c'est, une fois de
plus, le bassiste, Jonas Reingold
qui a attiré tout particulièrement mon attention. Bien que positionné de
l'autre côté de la scène (par rapport aux autres groupes), sa dextérité,
la sensibilité des sons émis par sa magnifique Rickenbacker ont apporté un
avantage notable à la prestation !
Je peux donc confirmer tout le bien que l'on m'avait rapporté sur ce
groupe ; je tâcherai à l'avenir de ne plus manquer leurs concerts, … si tant
est que leur aventure perdure !
PROGRAMME
Last Minute on Earth (The Rainmaker, 2001)
What If God Is Alone (Paradox Hotel, 2006)
There Is More to This World (Retropolis,
1996)
The Truth Will Set You Free (Unfold the
Future, 2002)
Stardust We Are
(Stardust We Are, 1997).
19h15-20h45 : PURE
REASON REVOLUTION. C'est grâce à Blackfield (et donc sans doute à Steven
Wilson) que je découvris sur la scène PPR du Café de la Danse le 27 février
2007, alors qu'il n'en finissait pas de promouvoir leur fabuleux opus "The
Dark Third" paru en 2006. Immédiatement séduit par leur rock
progressif à la fois puissant et aérien, j'ai eu de surcroit le plaisir de les
revoir le 3 juillet 2007 à la Cigale, cette fois en invité de Porcupine Tree (toujours
avec Steven Wilson, pour ceux qui n'ont pas tout suivi !).
Pure Reason Revolution
(PRR) est un groupe britannique formé en 2003, à l’Université de Westminster. Jon
Courtney (chant, guitares, claviers)
et Chloë Alper (chant, basse,
claviers) en sont toujours les piliers ; d'autres musiciens les ont
successivement entourés. Beaucoup (dont moi) leur prédisait un bel
avenir (même Rick Wakeman de Yes, parait-il !). Leur musique intégrait à
la base un subtil équilibre de rock progressif et d’électro. Mais, après un audacieux
virage nettement plus électro à partir de 2009 ("Amor Vincit Omnia"
en 2009 puis "Hammer and Anvil" en 2010), le groupe semble ne
pas avoir surmonté le désarroi des admirateurs de base. En novembre 2011, le
groupe se sépare.
Mes précédentes approches
avec la musique électro sont assez inégales ; j'écoute volontiers Kraftwerk ou
Jean-Michel Jarre et j'apprécie les emprunts ponctuels dans le rock progressif,
mais je ne me complais pas dans ce style, préférant le son des guitares ou des
claviers traditionnels à celui des synthés-à-programmations et autres boites-à-rythmes.
Je ne parviens pas encore à apprécier un concert d'Archive, par exemple. Mais
avec PRR, cela me parait différent. Question d'équilibres, justement. C'est
donc avec une énorme curiosité mêlée d'un zeste d'inquiétude que j'attends leur
surprenante réapparition aujourd'hui …
Bâouuum, dès les premières
séquences je sens le frisson m'envahir ; mes poils se dressent sur les
avant-bras, c'est un signe qui ne me trompe jamais. Impossible de rester
impassible à l'écoute de leurs rythmes irrésistiblement festifs ! On pourra
toujours débattre sur la nature de leur musique : prog ou pas prog ? Très
franchement, là comme ça, je m'en fous comme de mes premières chaussettes !!
Cette musique est mélodiques, puissante, entraînante, bref : jouissive… Les
voix douces de Chloë et de Jon entretiennent un saisissant contraste avec les
frappes redoutablement efficaces du batteur, et les accords rageurs de Chloë à la
basse. En bidouilleur de sons, Jon maîtrise parfaitement les mélodies et les
ambiances.
Le public ne s'y trompe pas
et on peut dire qu'une grande majorité termine le concert debout et en
redemande par une ovation à faire pâlir tout le reste de l'affiche du jour !!! D'ailleurs,
en me retournant je remarque la présence, dans le public, des membres de Jolly
également sidérés et emportés par l'ambiance créée… Il est vrai qu'après un
programme davantage progressif qu'électro (avec la reprise quasi intégrale The Dark
Third ),
PRR a choisi de clore sa prestation avec deux titres plus récents qui ne
pouvaient que souffler sur les braises d'un auditoire conquis ! Pour le tout
dernier titre ("Fight Fire"), Chloë s'est émancipée de sa basse et de
son clavier, munie seulement de son micro, elle s'est totalement libérée en dansant,
sautant comme une sauterelle … Il n'en fallait pas plus pour mettre le feu à
l'arène !
Allons, un petit bémol pour
ne pas paraître trop abusif, il me semble (une fois de plus) que l'usage des
bandes-son est excessif ; il manque clairement un titulaire au clavier (qui
était présent auparavant). D'ailleurs, il me semble qu'ils doivent en avoir
conscience eux-mêmes, car j'ai décelé des moments de flottement notamment entre
les titres, alors que les sons requis tardaient à se mettre en place. Des
regards inquiets m'ont semblé trahir cette lacune.
La jolie Chloë semble émue
et étonnée par l'ampleur de ce succès impressionnant, il est vrai. Alors
qu'elle revient participer au démontage de la scène elle est tout simplement
prise d'assaut par une nuée d'admirateurs, inutile de vous demander où j'étais…
C'est à peine si le pauvre Jon fut toléré sur les clichés !!!
J'ignore si leur prochain
opus annoncé me séduira, car je crains une persistance sur leur lancée électro,
mais en tous cas ce soir j'ai pris un plaisir extraordinaire.
PROGRAMME
Aeropause
(The Dark Third, 2006)
Goshen's
Remains (The Dark Third, 2006)
Apprentice
of the Universe (The Dark Third, 2006)
The
Bright Ambassadors of Morning (The Dark
Third, 2006)
Nimos
& Tambos (The Dark Third, 2006)
Voices
in Winter / In the Realms of the Divine (The
Dark Third, 2006)
Bullitts
Dominæ (The Dark Third, 2006)
Arrival
/ The Intention Craft (The Dark Third, 2006)
He
Tried to Show Them Magic! / Ambassadors Return (The Dark Third, 2006)
RAPPEL :
The
Twyncyn / Trembling Willows (The Dark
Third, 2006)
Deus
Ex Machina (Amor Vincit Omnia, 2009)
Fight
Fire (Hammer and Anvil, 2010).
21h50 (au lieu de 30)-22h30
: IQ. Voilà un groupe rock neo-progressif
britannique que je cherche à voir sur scène depuis trente-et-une années ; c'est-à-dire
depuis qu'un ami bien inspiré m'offrit pour mon vingt-cinquième anniversaire
"Nomzamo" qui, à défaut d'être un chef d'œuvre avait eu le
mérite de retenir mon attention à une époque où j'écoutais des sons biens plus
énervés ! Cependant, il m'a fallu attendre la fin des années 2000 pour réaliser
pleinement mon manque coupable de constance dans le suivi de leur parcours. Il
faut dire aussi à ma décharge, que ces messieurs ont pour fâcheuse habitude de
contourner la France lors de leurs rares tournées, ce n'est finalement
qu'aujourd'hui que je peux enfin mesurer leur talent sur une scène !
Fondé par Mike Holmes and Martin Orford en 1981, le
groupe montre une réelle instabilité puisqu'autour de Mike Holmes (guitares depuis 1981), les musiciens sont parfois partis
pour revenir, parfois non. Actuellement on retrouve cependant Tim Esau (basse de 1981 à 1989, puis depuis
2011), Peter Nicholls (chant de 1981
à 1985, puis depuis 1990), Paul Cook
(batterie de 1982 à 2005, puis depuis 2009), Neil Durant (claviers depuis 2010).
Un nouvel opus est
actuellement en cours d'enregistrement, le dernier opus "The Road of
Bones" (2014) est une pure merveille.
Vous l'aurez compris, c'est
dans une grande fébrilité que j'attends leur concert. Réceptif au moindre
frisson, je guette le moment de m'envoler au septième ciel de cette nuit d'été,
un peu comme lorsque je suis dans mon salon pour voyager hors du temps avec
leurs chefs d'œuvres que sont "The Road of Bones" et "Frequency".
Mais, les premières séquences
passent et un malaise m'envahit assez vite. Je ne vibre pas. C'est beau, c'est
proprement fait. Mais il manque une émotion, un bonheur partagé. A l'image du
chanteur, qui fait grise mine. Austère et pas vraiment charismatique il me
donne en outre l'impression qu'il a mal digéré le succès du groupe précédent…
Impression accentuée lorsqu'il a demandé au public de montrer davantage
d'enthousiasme à l'annonce du titre "The Seventh House". Quant aux autres musiciens, c'est le bal des
tourmentés, tous semblent accablés par leur destin, dans une bulle de malheur.
Il est vrai que leur néo-prog est particulièrement mélancolique, mais bon …
Seul Mike Holmes semble toujours aussi enthousiaste qu'à la fondation de son
groupe…Scrupuleusement appliqués sur leurs instruments ils ne
décrocheront que bien peu de sourires (je sais ce n'est pas un critère objectif
d'évaluation musicale, mais dans le contexte, cela s'ajoute au reste). Quant
aux échanges avec le public, seul Peter Nicholls évoquera à la fin du concert
une hypothétique tournée promotionnelle (qui
bien entendu évitera encore la France) pour le nouvel opus à venir. Il aura
fallu un admirateur placé à mes côté pour lui rappeler accessoirement sa
présence prévue à Loreley dans quelques semaines ; je ne serais pas étonné qu'il
boude une fois de plus (comme pour le
BeProg en 2015 !), …
Il n'est pas impossible que le choix des titres a
influé sur mon impression, car je dois reconnaitre que sur les onze titres, je
n'en connaissais que sept. Dans les quatre autres, il y eut un titre du futur
opus qui ne m'a pas particulièrement enthousiasmé… Les chansons "The Road of Bones" et "Until the End" ainsi que le final
"Frequency" furent en fait
mes seuls moments de vif plaisir.
De surcroit, IQ daigne nous offrir un rappel "royal"
de … un titre pour clore un concert qui n'aura pas duré les deux heures
escomptées !
Bref, je ressors de ce voyage un peu déçu. Pas
accablé, mais un peu déçu. En gros je pensais atteindre la stratosphère,
mais je n'ai pas dépassé la troposphère. C'est
déjà pas mal me direz-vous, mais j'ai l'impression ce soir d'avoir surestimé ce
que je pouvais attendre de ce groupe. Il n'est pas judicieux, ni juste de
comparer les artistes car ils ont chacun leur part de talent ; mais en tant que
spectateur, je ne peux m'empêcher de me rappeler le bonheur que m'apportent les
concerts d'autres néo-progueux tels que Marillion, Saga, Pendragon, Arena ou
plus récemment Anubis. Je pressens une grosse claque dans quelques semaines
avec The Windmill. Allons, soyons positif, et gageons que IQ sera en mesure de me
séduire à Loreley, ce sera le 19 juillet prochain.
PROGRAMME
State of Mine (Subterranea,
1997)
Breathtaker (Subterranea,
1997)
From the Outside In (The Road of Bones, 2014)
The Seventh House (The
Seventh House, 2000)
The Last Human Gateway (Middle Section) (Tales from the Lush Attic, 1983)
Sans
doute à l'instar des autres mélomanes de ma génération, l'évocation de
SUPERTRAMP me renvoie à la mémoire de douces sensations adolescentes, à la fois
lumineuses et tourmentées. Je me revois à la campagne ou dans ma chambre,
allongé sur mon lit, rêvassant à tout et à rien, emporté par ces mélodies
entêtantes, inoubliables. A cette époque, je n'imaginais pas l'importance
artistique de ces œuvres qui passaient à la radio entre un titre des Bee Gees
et un autre d'Olivia Newton John. Le temps est passé, les paillettes sont
tombées et seules les étoiles continuent de briller. SUPERTRAMP est l'une
d'entre elles. Comme beaucoup d'autres étoiles, elle est hélas morte, mais
continue à briller et à faire rêver les éternels adulescents dont je fais
partie. Cette illusion est vaillamment entretenue par Roger Hodgson, l'âme
historique du groupe défunt qu'il a quitté en 1983.
Il
est permis, en tous cas je me permets, de déplorer ce départ qui fut justifié par
le tourbillon d'un succès difficile à gérer à l'époque. A l'instar des
admirateurs des Beatles, de Pink Floyd, d'ABBA et de bien d'autres groupes
prometteurs, nous avons été condamnés aux regrets éternels et à une frustration
jamais consolée. Dans nos rêves, nous espérions un Phœnix, alors qu'en réalité
Supertramp était composé d'hommes ordinaires avec leurs forces mais aussi leurs
faiblesses.
Mais
ce soir, il s'agit davantage que d'une illusion, car le Roger revient à Paris
qui l'accueille pour cinq dates (31 mai, 1er, 2, 3 et 4 juin) à
l'Olympia, à guichets fermés. C'est donc en privilégiés que nous prenons places
au troisième rang, juste en face du Monsieur pour assister à ce qui restera à
n'en point douter un des moments forts de l'année. Car en effet, inutile de
tourner autour du sujet, le Roger nous a ravi à tous points de vue.
D'abord
parce qu'il a eu la judicieuse idée de s'accompagner de musiciens très talentueux
afin de se rapprocher au mieux de l'univers de SUPERTRAMP : les californiens David
J Carpenter (basse, chœurs), et Bryan
Head (batterie), l'américain Michael
Ghegan (saxophone, clarinette,
flûtes, Harmonica, claviers, chœurs et percussions), et le canadien Ray Coburn (ex-Honeymoon Suite) (claviers, chœurs). Alors que Roger vient de
fêter ses 69 ans ce 21 mars, son talent sa vigueur et son sens artistique me
paraissent heureusement intacts. Sa voix continue à nous ravir les esprits, le
poids des ans me semble n'altérer que très peu son timbre. Si peu que personnellement
je n'ai rien perçu de fâcheux ; je n'évoque cette légère réserve qu'en écho à
une conversation post-concert.
L'éclairage
est lumineux, le son excellemment réglé, la scène relativement sobre est décorée
de palmiers. Les musiciens ont leur espace respectif dont aucun ne sortira. Seul
Roger alterne entre son piano et le micro placé au centre de la scène. Ray
Coburn semble "remisé", au fond à gauche de la scène ; Roger le surveille
dans ses rétroviseurs astucieusement vissés sur son propre clavier ! Cependant
le soutien le plus remarqué est indéniablement Michael Ghegan, un artiste
complet aussi à l'aise avec un saxo qu'avec le reste de ses nombreux
instruments. Un pur régal à chacune de ses interventions.
Autre
motif de réjouissance, la communication de Roger. Juste après le titre
d'introduction, il s'adresse au public pour l'inviter à laisser les soucis du
quotidien à l'extérieur et de se laisser bercer afin de ressortir de son
concert avec le sourire. Il n'hésitera pas à réitérer ce souhait, signe de la
bienveillance et de la sensibilité de cet honorable artiste.
Bref,
le climat est parfait pour passer une soirée mémorable. Ce compositeur
exceptionnel dispose d'un répertoire suffisamment étendu et méritoire pour
satisfaire sans lasser. Toutefois, l'absence de certains titres serait une
source de frustration ; l'artiste l'a bien compris.
PROGRAMME
:
Nous aurons eu
droit à 20 titres (au RAH en 2013 ce fut
22), choisis judicieusement dans son répertoire le plus populaire, sans
pour autant favoriser "Breakfast in
America" dont il était pourtant supposé commémorer le quarantième
anniversaire ; nous nous contenterons donc de 5 titres. "Supertramp/Crisis? What Crisis?" (1975)
aura été évoqué avec 3 titres, "Crime
of the Century" (1974) : avec 3 titres, "Even in the Quietest Moments" (1977) avec 3 titres et "Famous Last Words", (1982) avec 2
titres. Par ailleurs, quatre titres de ses opus solo auront été disséminés ici
est là, dont j'aurai particulièrement remarqué "Death and a Zoo".
Acte 1
Take the Long Way Home
(Supertramp/Breakfast in America, 1979)
School (Supertramp/Crime
of the Century, 1974)
Breakfast in America (Supertramp/Breakfast in America, 1979)
Easy Does It (Supertramp/Crisis? What Crisis? 1975)
Sister Moonshine (Supertramp/Crisis? What Crisis? 1975)
Lovers in the Wind (In the Eye of the Storm, 1984)
A Soapbox Opera (Supertramp/Crisis? What Crisis? 1975)
Along Came Mary (Open the Door, 2000)
Lord Is It Mine (Supertramp/Breakfast in America, 1979)
The Logical Song (Supertramp/Breakfast in America, 1979)
Acte 2
Child of Vision (Supertramp/Breakfast
in America, 1979)
Death and a Zoo (Open the Door, 2000)
If everyone was listening (Supertramp/Crime of the Century, 1974)
Even in the Quietest Moments (Supertramp/ Even in the Quietest Moments,
1977)
Had a Dream (In the Eye of the Storm, 1984)
Don't Leave Me Now (Supertramp/ Famous Last Words, 1982)
Dreamer (Supertramp/Crime
of the Century, 1974)
Fool's Overture (Supertramp/ Even in the Quietest Moments, 1977).
RAPPEL
Give a Little Bit (Supertramp/ Even in the Quietest Moments, 1977)
It's Raining Again (Supertramp/ Famous Last Words, 1982).
C'est
sur cette chanson optimiste que l'artiste et ses complices nous quittent ; "Il n'y a que le temps qui guérit la peine,
Et fait que le soleil se relève de nouveau" …Moui, c'est une forme
d'obstination positive à laquelle on peut faire mine de croire, au moins tant
qu'on est ici et ensemble…
Les
discussions entre auditeurs ravis vont bon train. Les minutes s'égrainent tant
et si bien que nous restons une quinzaine, à attendre Roger à la sortie des
artistes, tard dans la nuit, au risque de manquer le dernier métro. Les autres
musiciens sortent les uns après les autres ; David J Carpenter est
particulièrement disponible. Roger finit par sortir à son tour, visiblement
fatigué et pressé de partir, mais souriant. Avec un flegme tout britannique il
refuse les autographes, mais consent à poser pour quelques portraits en
compagnie de ses admirateurs les plus tenaces ... dont moi et ma p'tite Fée,
très émus. Au bout de quelques minutes, nous le laissons s'éloigner dans la
nuit parisienne, même si on a envie de lui chanter "Don't leave me now, All alone in this crazy world, When I'm old and
cold and grey and time is gone" (Ne
me laisse pas maintenant, Tout seul dans ce monde fou, Quand je suis vieux,
froid et gris et que le temps s'est enfui).